Beau casting pour la 68e édition de la manifestation cannoise. Dans ses faisceaux, des grands cinéastes, des nouveaux talents et cinq films français… moteur !
1 854 films visionnés par les trois comités de sélection cannois, avant d’établir la playlist des titres retenus cette année. Dans la foulée, poser des noms nouveaux sur la carte du cinéma mondial, réserver une place à des premiers films, prendre des risques. Au bout du compte, sur le papier, c’est une alléchante sélection du Festival de Cannes qu’a présentée Thierry Frémaux, Délégué Général de la manifestation, le 16 avril dernier.

Parmi la vingtaine de films en compétition officielle (sans parler des films d’Un certain regard, l’autre volet de projections du Festival), on retrouve là des noms de grands metteurs en scène. À commencer par Gus Van Sant, déjà palmé, qui présente cette fois The sea of trees, avec Naomi Watts et Matthew McConaughey, ou le cinéaste taïwanais Hou Hsiao Hsien pour The Assassin, un film de sabre avec la sublime actrice Shu Qi (inoubliable interprète de Millenium mambo du même Hou Hsiao Hsien). Idem avec Nanni Moretti, qui est chez lui à Cannes, avec une Palme d’or à son crédit et une présidence du jury. Il sera là pour Mia madre, avec John Turturro.

Autre maître de la caméra et habitué de La Croisette, le Chinois Jia Zhang-Ke, dont la dernière participation au Festival, il y a deux ans, avait fait sensation, avec A touch of sin. Chacune de ses venues à Cannes fait de lui un prétendant sérieux à la Palme. Qu’en sera-t-il en 2015 avec son nouvel opus, Mountains may depart ?

Audiard versus Sorrentino
À ce quatuor magistral, viennent se joindre les chouchous des sélectionneurs cannois que sont Paolo Sorrentino ou Jacques Audiard. Deux cinéastes différents mais gagnés l’un et l’autre par les stigmates d’un cinéma qui se regarde en train de filmer. Cela n’empêche pas leurs films d’être de nouveau très attendus sur La Croisette. Titre du Audiard, Deephan, tourné avec des inconnus, l’histoire d’un réfugié politique sri-lankais tamoul, gardien d’immeuble en banlieue parisienne. Pour Jeunesse, Sorrentino, lui, a convié devant sa caméra deux fins limiers du jeu d’acteur, Harvey Keitel et Michael Caine.

Toute première fois
Dans ce survol de la sélection cannoise, on fera une pochette surprise avec les films de cinéastes pour la première fois en compétition. C’est le cas de Stéphane Brizé, qui emmène avec lui son comédien fétiche, Vincent Lindon, pour La loi du marché, une chronique sociale tout comme le film d’Audiard. Avec Sicario, le Canadien Denis Villeneuve fait également son entrée au Palais des Festivals. Il y vient en bonne compagnie, son acteur principal étant un certain Benicio del Toro. Un film qui parle lui aussi de désintégration sociale, dans le sillage des cartels de la drogue qui sévissent à la frontière américano-mexicaine.

Valérie Donzelli, elle, a gagné ses galons de cinéaste en vue sur La Croisette, mais c’était dans le cadre de la Semaine Internationale de la Critique, où elle présentait La guerre est déclarée, en 2011. La voici dans la cour des grands avec un film d’époque, Marguerite et Julien, sur un scénario de Jean Gruault écrit à l’origine pour François Truffaut. Au générique, la coqueluche du cinéma d’auteur, Anaïs Demoustier, et Jérémie Elkaïm.

Autre film en costumes, Macbeth de l’Australien Justin Kurzel, cinéaste jamais encore vu ici, mais qui ne va pas passer inaperçu avec sa distribution de stars, Marion Cotillard et Michael Fassbender. Cas de figure différent pour le Grec Yorgos Lanthimos, déjà remarqué à Cannes via Un Certain regard. Pour sa première course à la Palme, il est sur les starting-blocks avec The lobster, et là encore il y aura du beau monde au générique, Colin Farell y partageant l’affiche avec Rachel Weisz et Léa Seydoux. Thierry Frémaux est resté tout chose devant ce film, le présentant comme “une oeuvre originale et mystérieuse”.

Quant au Hongrois László Nemes, il arrive directement sur les marches, sans détour. Premier long métrage et dans la foulée, sélection en compétition officielle pour Le fils de Saul, tableau décapant de la vie dans un camp de concentration. Attention, polémique dans l’air ! a prévenu l’ami Frémaux.

De Catherine Deneuve à Maïwenn
Il faudrait encore citer, parmi les films en compétition officielle, Le conte des contes de Matteo Garrone, ou Notre petite soeur, de Kore-Eda hirokazu, les deux auteurs de ces films étant des valeurs sûres du Septième Art. Évoquer d’un mot le “mélo moderne”, dixit Frémaux, de Maïwenn, Mon roi, avec Vincent Cassel et Emmanuelle Bercot. La même Emmanuelle Bercot qui, en sa qualité de réalisatrice, signe le film d’ouverture du Festival, La tête haute, projeté hors compétition. Joli titre pour placer la manifestation sous les meilleurs auspices. Elle retrouve ici Catherine Deneuve, qu’elle avait dirigée dans Elle s’en va, aux côtés de Sara Forestier, Benoît Magimel et un jeune inconnu dans le rôle principal, Rod Paradot.

Hors compétition lui aussi, le nouveau Woody Allen est Un homme irrationnel, avec Emma Stone et Joaquin Phoenix. Comme l’indique son sobriquet, lui non plus n’est pas vraiment ce qu’on appelle un homme rationnel et c’est bien pour ça qu’on l’aime.

Mad Max : Fury Road, de George Miller mais sans Mel Gibson, remplacé par Tom Hardy flanqué d’une méconnaissable Charlize Theron la boule à zéro pour les besoins du rôle, déboule hors compétition sur La Croisette, en avant-première mondiale. Ça va faire mal !

Coups de coeur !
Pour finir en beauté ce panorama cannois, deux films tournés à New York qui, à vue d’oeil, pourraient bien électriser La Croisette. Celui de Joachim Trier, Louder than bombs, avec Isabelle Huppert. Celui de Todd Haynes, Carol, avec Cate Blanchett. En vertu de quoi ? Deux interprètes au sommet de leur art. Todd Haynes, cinéaste rare et accompli. Joachim Trier, réalisateur bouleversant avec son précédent film Oslo 31 août, présenté à un Certain regard… On prend les paris !
